Emission du 5 juillet 2020: notre invité est Guillaume Ribot, réalisateur d’un documentaire saisissant, retraçant toute l’histoire du livre noir de Solomon Mikhoels, Ilya Ehrenbourg, et Vassili Grossman, et la manière dont le livre nous est finalement parvenu, plus de cinquante ans après son écriture.
La rencontre d’Albert Einstein, à la genèse du Livre Noir
Emission du 22 octobre 2017: notre invitée est la réalisatrice Priscilla Pizzatto, pour le documentaire qu’elle consacre à l’histoire du livre Vie et Destin, de Vassili Grossman, qui sera projeté le 24 janvier 2018 sur Arte.
« L’essentiel de notre XXè siècle tient dans le face à face des forteresses de la mort, Auschwitz et la Kolyma, et tout ce qui tourne autour, nazisme, communisme, guerre mondiale, révolution… Si l’on veut écrire un livre qui ait une chance de totaliser un peu de l’esprit de ce temps, et pas seulement de témoigner d’une réalité partielle, il suffit de prendre à bras le corps ce grand débat, grand jeu de miroir en fait. C’est ce qu’a fait Vassili Grossman avec Vie et Destin. Il fallait seulement avoir vécu soi-même au cœur des ténèbres et se sentir la force d’un Titan ». Ces phrases sont d’Olivier Rolin, parues dans Libération au début des années 80, quand Vie et Destin est enfin devenu disponible dans sa traduction en français ; Olivier Rolin, l’un des intervenants du documentaire Le Manuscrit sauvé du KGB. ‘Vie et destin’ de Vassili Grossman, qui sera diffusé le 25 octobre sur Arte. 35 ans après avoir écrit ces lignes, il revient y dire aujourd’hui le choc que représente la découverte de ce livre monumental qui raconte la bataille de Stalingrad, la découverte des camps nazis et la prise de conscience de l’extermination des Juifs, et cela en engageant une ample réflexion sur le totalitarisme où le nazisme et le stalinisme sont en effet mis l’un en face de l’autre.
NB l’émission annonçait une diffusion le 25 octobre 2017: celle-ci a été reportée, Arte ayant finalement programmé une soirée d’hommage à Danielle Darrieux ce même soir.
Vassili Grossman, un écrivain de combat. C’est le titre de l’exceptionnelle biographie parue aux éditions du Seuil et réalisée par Myriam Anissimov, notre invitée, qui retrace la vie et l’itinéraire intellectuel de l’auteur de Vie et destin, expliquant comment la découverte de la Shoah, des massacres commis par les Einsatzgruppen sur le front de l’Est transforment Vassili Grossman en écrivain juif, engagé, bientôt soumis à l’antisémitisme profond du régime soviétique et à la censure.
Au terme d’une minutieuse enquête, menée en Russie, en Ukraine et en Israël, Myriam Anissimov nous offre le compte rendu détaillé du parcours de Vassili Grossman (1905-1964). Les années de guerre sont tout à fait capitales dans la compréhension de l’itinéraire de Vassili Grossman. Correspondant de guerre, il vit à la fois les moments les plus importants du front, notamment la bataille de Stalingrad, mais surtout découvre les massacres commis par les Einsatzgruppen, qui ont décimé l’ensemble de la population juive d’Ukraine, notamment de Berditchev sa ville natale, où vivait sa mère, mais aussi de Babi Yar, où 50 000 juifs de Kiev ont été assassinés. En 1944, il est l’un des premiers à entrer dans Maidanek et Treblinka. Il participe à l’entreprise de collecte de témoignages de crimes nazis en URSS, qui aboutira au Livre noir, initié par le Comité juif antifasciste, qui servira de preuve au procès de Nuremberg.
En retraçant l’extraordinaire destin d’un écrivain (chimiste de profession) d’abord célébré par les autorités, puis de plus en plus critique à mesure qu’il prend conscience de la stratégie totalitaire et sanglante du stalinisme et surtout lorsqu’il devient lui-même victime de l’antisémitisme, Myriam Anissimov raconte toute l’histoire de l’ancienne URSS.
Grossman mourra sans avoir assisté à la publication de son ouvrage fondamental, document exceptionnel sur la manipulation et la destruction des individus, au nom d’un hypothétique bien collectif. La maladie aura raison de sa résistance et c’est grâce à la ténacité de ses proches et amis que son chef-d’oeuvre sera publié.
Myriam Anissimov est née en 1943 dans un camp de réfugiés en Suisse. D’origine polonaise, elle est l’auteur de plusieurs romans dont La Soie et les Cendres (Payot), Dans la plus stricte intimité (L’Olivier), Le Marida (Julliard), Sa Majesté la Mort (Seuil) et des biographies de référence de Primo Levi (Lattès) et Romain Gary (Denoël).
Ce livre a reçu le soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.
Myriam Anissimov présentera son livre mardi 26 juin à 19h au Mémorial de la Shoah dans le cadre du festival des cultures juives.
Lire un extrait du livre sur le site des éditions du Seuil.