Emissions du 19 et du 26 janvier: notre invité est l’historien Emmanuel Debono, membre de la Commission Mémoire et Transmission de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah, à l’occasion de la parution de son livre: le racisme dans le prétoire, antisémitisme, racisme et xénophobie devant la loi, aux éditions PUF.
Mémoires Vives invite pour ses deux émissions de rentrée Alain Chouraqui, sociologue, directeur de recherche émérite au CNRS, et Président de la Fondation du Camp des Milles – Mémoire et Éducation.
Alain Chouraqui a dirigé « Pour résister (à l’engrenage des extrémismes, des racismes et de l’antisémitisme », paru aux éditions du Cherche midi. Il s’agit d’un ouvrage collectif, qui est à la fois une analyse scientifique des mécanismes qui ont conduit au pire, à travers une approche pluridisciplinaire et intergénocidaire, mais aussi et surtout un livre d’espoir qui montre comment résister.
Ce livre est aussi une préparation utile à quiconque veut visiter le site-Mémorial du Camp des Milles, car il développe les contenus du « volet réflexif », qui est l’une des particularités de ce centre d’histoire, de mémoire et d’éducation.
L’autre émission est consacrée à l’actualité du Site-Mémorial du camp des Milles et notamment la cérémonie officielle d’inauguration de la Chaire UNESCO « Éducation à la citoyenneté, sciences de l’homme et convergence des mémoires », qui aura lieu le 8 octobre 2015 en présence du Président de la République et de la Directrice générale de l’UNESCO. Cette chaire est l’un des dispositifs majeurs de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme menée avec les pouvoirs publics, avec un dispositif de labellisation qui permettra de reconnaître l’engagement d’une personne à travers le brevet citoyen, l’engagement d’une structure en particulier d’éducation informelle à travers l’habilitation citoyenne, et une action collective à travers le label citoyen.
Dans un contexte de repli identitaire et de nationalisme, les quatre principales associations antiracistes françaises ont par ailleurs lancé le 20 septembre 2015 conjointement un Appel national contre la montée des extrémismes, des racismes et de l’antisémitisme. Sous le titre « l’histoire alerte le présent », cet appel a été lancé à l’occasion du premier forum « Démocratie, Mémoires et Vigilance » organisé par la Fondation du Camp des Milles.
Les présidents de la Ligue des Droits de l’Homme, la LICRA, le MRAP et SOS Racisme ont rappelé leur combat en faveur de la tolérance et du vivre-ensemble, et réaffirmé leur profonde opposition « à tous les discours et à toutes les politiques de haine et d’exclusion qui préparent, toujours, le pire ».
Face à la montée des extrêmismes en France et dans le monde, ils ont ainsi condamné les « discours démagogiques qui se saisissent de difficultés objectives, de peurs et de colères pour justifier l’injustifiable : la désignation de boucs émissaires et leur exclusion ». Des mécaniques qui « déstabilisent le vivre ensemble, l’ordre public, l’idée même d’un avenir commun ».
Cet Appel national a été lancé depuis le Camp des Milles, « afin de rappeler que notre démocratie vit et se développe à l’ombre de l’histoire. Ce lieu, seul camp français d’internement et de déportation encore intact, témoigne en effet des persécutions et des déportations du régime de Vichy dont les héritiers et les défenseurs relèvent aujourd’hui la tête ».
Invité cette semaine, Emmanuel Debono, historien, pour son livre « Aux origines de l’antiracisme, la Lica, 1927-1940 » paru à la rentrée chez CNRS Editions.
Une émission animée par Kristel Le Pollotec
Ce livre retrace la genèse de la LICA (l’ancêtre de la LICRA) depuis sa création en 1927 jusqu’à sa dissolution, en 1940. Surtout, il nous entraîne dans la France des années 30 et détaille avec une minutie remarquable la montée de l’antisémitisme sur tout le territoire, en France comme dans les colonies. Ciblant d’abord les manifestations antijuives qui surviennent en Europe centrale et orientale, la LICA doit en effet très vite affronter la résurgence de l’antisémitisme dans une France où on le croyait à tort éteint, et faire face à un défi sans précédent, le national-socialisme.
Dans le contexte tourmenté des années 1930, les militants de la LICA inventent une doctrine et se dotent de moyens d’action. À côté des batailles rangées contre leurs adversaires, du boycottage des dictatures et d’une propagande véhémente, ils définissent un projet politique visant à donner une dimension institutionnelle à l’antiracisme dans la France républicaine.
S’appuyant sur des fonds d’archives inédits et considérables – dont les archives de la LICA rapatriées de Moscou au début des années 2000 et désormais disponibles au mémorial de la Shoah-, Emmanuel Debono retrace l’histoire des pionniers du militantisme antiraciste en France, avant que la défaite de 1940 ne plonge leur idéal dans les ténèbres. Il met en lumière l’attitude des pouvoirs publics, celle des élites politiques et intellectuelles, en métropole comme en Afrique du Nord, face à des démonstrations de haine souvent minimisées.
Docteur en histoire de l’IEP de Paris, Emmanuel Debono travaille sur les racismes et les antiracismes dans la France contemporaine.
Dans le cadre de ses recherches, il a bénéficié d’une bourse de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.